Salle 1B : les Vues de Mulhouse du 19e au 21e siècle

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Mulhouse sort de ses remparts

Au début du 19e siècle, la silhouette de Mulhouse connaît une transformation majeure : ses remparts disparaissent progressivement et l’espace au-delà des fossés s’urbanise lentement. C’est ainsi que sur la gravure de Matthieu Mieg de 1810, au-delà d’un Rebberg très viticole, apparaissent des constructions devant l’ancienne porte du Miroir ainsi que le nouveau cimetière circulaire entouré d’arbres ouvert en 1803 à l’emplacement de l’actuel lycée Montaigne. En 1812, on aurait même pu voir la cheminée de la première machine à vapeur ! 

Bernard Jacqué, Société d’Histoire et de Géographie de Mulhouse

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« Panorama de Mulhouse » Braun
Adolphe Braun (1812-1877); « Panorama de Mulhouse ». Dornach, entre 1857 et 1859. Montage de 3 photographies à l'albumine, publiées par Adolphe Braun dans son recueil L’Alsace photographiée, 1859. Fac-similé, aux dimensions de l’original, d’après l’exemplaire conservé à la Bibliothèque des Dominicains de Colmar
L’Alsace photographiée, qui comprend 120 grandes photographies, est un ouvrage monumental et novateur qui valut au Mulhousien Adolphe Braun une admiration générale. Le point de vue des 3 tirages qui forment l’impressionnant panorama de Mulhouse serait le même que celui de la vue de Maugendre de 1857, à savoir le jardin d’agrément du négociant C. Mansbendel. 
Détail particulièrement intéressant, on peut voir l’église Saint-Etienne en construction : le chevet seul est achevé, qui attend son clocher. On sait que le 15 août 1856, lors de la fête de l’empereur, fut posée la première pierre de l’église, dont la flèche fut coiffée de sa croix de 15 mètres en mai 1860. Le temple Saint-Etienne, lui, est encore visible dans son ancienne configuration (la première pierre du nouveau temple fut posée le 15 août 1859).
Il existe un autre « panoramique » de Mulhouse édité postérieurement par la maison Braun, mais en 2 parties (et non 3), et d’un point de vue différent, en surplomb du Réservoir.

 

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« Vue de Mulhouse » Huber
Rudolf Huber (1770-1844), « Vue de Mulhouse ». Mulhouse, 1842. Lithographie publiée par G. Engelmann père et fils, colorée à la main. Bibliothèque municipale de Mulhouse. Achat 2019
Lithographie très proche de la « Vue de 1836 », des mêmes Rudolf Huber et Godefroy Engelmann (fils uniquement, le père étant mort en 1839, même si la raison sociale demeure). La nouveauté tient dans la présentation de cette estampe, relativement novatrice avec la vue cavalière au centre, encadrée de vignettes figurant les principaux édifices et monuments de la ville. Elle tient aussi et surtout à la représentation de l’arrivée du chemin de fer à Mulhouse : la nouvelle gare inaugurée en 1841 est bien visible, et plusieurs trains et locomotives fumantes sont sur les rails, l’un vers Thann, l’autre venant de Bâle (sur la droite). Il est intéressant de comparer, entre la vue de 1836 et celle de 1842, soit un laps de temps relativement court, la transformation urbaine induite par l’arrivée du rail de part et d’autre du Canal, entre le Nouveau Quartier et le pied des collines en direction desquelles la ville se développe. A remarquer d’ailleurs les quelques bâtisses supplémentaires visibles sur les pentes du Rebberg. Si les petites scènes animées du premier plan sont un moins bucoliques que dans la vue de 1836 (la vue de 1842 est plus « bourgeoise »), les cheminées d’usines sont aussi très estompées par rapport à la première, comme s’il s’agissait de mettre en avant d’autres aspects de la vie sociale (enseignement, soins et assistance, cercle social, diversité des cultes, etc.)
Le point de vue du dessinateur se situe très vraisemblablement vers le haut de la Brübach Gaße d’alors, plus précisément le segment compris entre les intersections avec les actuelles rues de l’Argonne et du Frêne. La Brübach Gaße, sur laquelle on observe que des attelages de chevaux ou de bœufs pouvaient largement se croiser, était encore classée chemin communal de 2e ordre. Elle a été élargie et bordée de murets empierrés depuis la vue de 1836. (voir le trésor rédigé sur ce document en 2020)
 

 

Milieu du 19e siècle : La « petite Manchester » française

1826-1836 : Nouveau Quartier et cheminées, la radicale mutation du paysage urbain
Deux événements majeurs marquent les années 1810 : les portes puis les murailles commencent à tomber sous le coup des démolisseurs ; les manufactures adoptent la machine à vapeur.
Jusque-là, à quelques exceptions près, les manufactures s’étaient installées dans « la clandestinité paysagère » du bâti disponible de la vieille ville. À l’aube du XIXe siècle, les industriels se ruent hors-les-murs et enserrent la vieille ville dans une ceinture usinière à trois gros nœuds : l’entreprise textile intégrée DMC qui, installée en 1800 à Dornach, se développe en s’étirant vers Mulhouse le long du Steinbächlein ; le pôle textile et métallurgique de la porte du Miroir (AKC, future SACM, a été fondée en 1836 par André Koechlin) ; enfin, le pôle textile de la porte Jeune (la Dentsche).
En 1812, la filature géante de DMC (récemment disparue) inaugure le siècle de la vapeur à Mulhouse. Les cheminées surgissent dans le paysage et leur fumée proclame la vitalité économique de la Cité.

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« Le Roi, examinant le Canal Monsieur du haut de la terrasse de l’édifice principal du quartier Charles X »
Nicolas Chapuy, (1790-1858), Victor Adam (1801-1867), « Le Roi, examinant le Canal Monsieur du haut de la terrasse de l’édifice principal du quartier Charles X ». Mulhouse, 1828-1829. Lithographie imprimée par Godefroy Engelmann, publiée dans la Relation du voyage de Sa Majesté Charles X en Alsace (Strasbourg : Levrault, 1829) de Fargès-Méricourt. Archives municipales de Mulhouse
Le Nouveau Quartier et le bâtiment de la Bourse, dans lequel était présentée alors une « Exposition des produits de l’industrie », ne sont pas terminés le 11 septembre 1828 lorsque Charles X visite Mulhouse, scellant par là la réconciliation entre la ville libérale et la monarchie des Bourbons. On voit ici la délégation royale accompagnée par les autorités de la ville, sur la terrasse qui coiffait alors le bâtiment central de la Bourse, observant le canal du Rhône au Rhin (celui-ci sera ouvert l’année suivante) et son Bassin, l’un des symboles de la modernité et de l’essor économique de Mulhouse. Aucune construction encore autour du bassin que baigne le canal. Sur la droite, en direction de Brunstatt, un moulin à vent domine la vallée de l’Ill, sur un promontoire correspondant sans doute au lieu-dit « Hasenrain » dont André Koechlin fera l’acquisition. 

 

Le canal du Rhône au Rhin, creusé dans les années 1810, est mis en service au début des années 1830 pour amener les matières premières pondéreuses jusqu’au bassin de déchargement (square Charles de Gaulle). Moins de dix ans plus tard, la troisième ligne ferroviaire de France transporte les produits chimiques depuis Vieux-Thann (entreprise Kestner fondée en 1808). En 1841, une gare est érigée à proximité du bassin du canal. Ces infrastructures de transport structurent pour partie un premier étalement de la tâche urbaine.
La sortie hors-les-murs et l’énergie de la vapeur nécessitent de construire des bâtiments usiniers ad hoc. Ce sont ces usines-blocs, ces longs bâtiments à 4 ou 5 étages, flanqués de leur « bloc vapeur », que découvre le promeneur depuis le Rebberg.
Les transformations du paysage urbain ne se limitent pas au bâti industriel. La densification et la taudification de la vieille ville provoquées par le développement des manufactures ainsi que l’enrichissement rapide des familles industrielles amènent celles-ci à, elles-aussi, s’établir hors-les-murs : c’est la fin du « vivre ensemble » à l’abri des remparts et le début du « vivre entre soi », caractéristique de notre société industrielle. La construction en 1827 d’hôtels particuliers sur arcades, selon le modèle de la rue de Rivoli à Paris (1805), en un plan triangulaire proclamant l’appartenance de la plupart des industriels à la franc-maçonnerie, ainsi que l’installation de la toute nouvelle Société industrielle fabrique, à proximité de la gare et du bassin, un Nouveau Quartier qui est aussi le cœur économique de la ville.
Dans la seconde moitié du siècle, s’érige la Cité ouvrière, de l’autre côté de la vieille ville : elle est invisible depuis le promontoire du Rebberg, tout comme les faubourgs, les axes majeurs de circulation, etc.

Marie-Claire Vitoux,
Société d’Histoire et de Géographie de Mulhouse

 

Voir aussi https://bibliotheques.mulhouse.fr/recherche/viewnotice/id_sigb/296812/id_site/*

Mieg, du levant au couchant

 

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Vue de Mulhausen (du côté du levant)
Jean Mieg (1791-1862), « Vue de Mulhausen (du côté du levant) ». Mulhouse, entre 1822 et 1825. Lithographie de Godefroy Engelmann, de la suite des Manufactures du Haut-Rhin (planche IV). Bibliothèque municipale de Mulhouse
Jean Mieg reprend le titre de la gravure de Luttringshausen (1810) mais avec un point de vue correspondant davantage à la gravure « Vue De La Ville De Mulhouse Du Côté du Couchant » de 1770 publiée par D. Herrliberger. L’ensemble de bâtiments constitué autour d’une villa (construite à l’époque du Directoire ou du Consulat) que l’on aperçoit à gauche sur la colline, au lieu-dit « la Wanne », à la limite du ban communal marqué par la borne à la roue de Mulhouse, en direction de Riedisheim, correspond au domaine dont les propriétaires successifs furent Jean-Michel Hofer, fabricant d’indiennes, son gendre Jean Thierry (idem) puis Daniel Koechlin-Schouch, éminent chimiste de la maison Koechlin frères.
A l’exception de trois cheminées fumantes et de quelques bâtiments usiniers reconnaissables, la nouvelle vocation industrielle de Mulhouse est moins marquée sur cette vue, plus bucolique (on retrouve au premier plan la scène de chasse de la peinture de 1810). A remarquer toutefois la représentation du canal du Rhône au Rhin (creusé à partir de 1804), avec un bateau tiré par des chevaux sur le chemin de halage, symbole du développement commercial et industriel que connaît alors Mulhouse. Bien avant le chemin de fer, le canal constitue le premier maillon du désenclavement de la ville, le long duquel celle-ci s’étend progressivement. 

 

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Vue de Mulhausen, du côté du couchant
Jean Mieg (1791-1862), « Vue de Mulhausen, du côté du couchant ». Mulhouse, entre 1822 et 1825. Lithographie de Godefroy Engelmann, de la suite des Manufactures du Haut-Rhin (planche III). Ici, une épreuve colorée à la main avec figuration et indications, dans la marge inférieure, des principales manufactures. Bibliothèque municipale de Mulhouse
Si jusque-là les estampes représentant Mulhouse étaient dues à des artistes suisses, celle-ci est « purement mulhousienne », par son dessinateur et son imprimeur, mais encore par la thématique inédite qui est celle des Manufactures du Haut-Rhin publiée par Engelmann. Jean Mieg, fils de Mathieu Mieg, innove ici avec une vue de Mulhouse depuis les hauteurs de Dornach (« du couchant », au sens de « depuis le couchant », donc tournée vers l’est, le « levant »), sur le ban de laquelle sont implantés les établissements Dollfus, Mieg & Cie et Blech, Fries & Cie (représentés sur la gauche). A l’arrière-plan, le Rebberg et la Forêt-Noire. 
Cette estampe, où la silhouette massive des usine-bloc eclipse largement la ville médiévale et ce qui demeure des fortifications, est sans doute la première à figurer Mulhouse avec des cheminées fumantes (leur nombre ne fera qu’augmenter sur les lithographies des décennies suivantes). Un nouveau visage de Mulhouse se dessine, où les « fabriques » semblent dresser une nouvelle ceinture autour de la ville, laquelle s’étend progressivement au-delà de son périmètre séculaire pour les besoins de son industrie. En plusieurs endroits, des prés d’étendage pour les tissus, des faisceaux de lattes pour le séchage, des ouvriers qui s’activent…

 

Mulhouse et ses manufactures

 

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M. F. Boehm (17..-18..)  « Mulhouse et ses manufactures »
M. F. Boehm (17..-18..), « Mulhouse et ses manufactures ». Strasbourg, 1826-1828. Lithographie publiée dans Jean-Frédéric Aufschlager, L'Alsace, nouvelle description historique et topographique des deux départemens du Rhin (vol. II), Strasbourg : J.H. Heitz, 1826-1828, planche 7. Archives municipales de Mulhouse.
Dans cet ouvrage présentant les communes des deux départements alsaciens par arrondissements (Mulhouse fait lors partie de celui d’Altkirch), Mulhouse fait l’objet d’une description qui insiste sur son « industrie » : fabrication de draps, blanchisserie, teinturerie… (Même la lithographie est mentionnée, avec l’établissement de Godefroy Engelmann). Pas moins de 23 « maisons » (manufactures) sont nommées, et une planche hors-texte imprimée en lithographie (Boehm est, vers 1817-1818, le premier imprimeur-lithographe installé à Strasbourg) en situe plusieurs. Nous reproduisons la légende, à laquelle renvoient les lettres dans la planche : 
« à droite, une partie de la ville de Mulhouse ; à gauche, une partie du village de Dornach. A. Eglise et maisons de Dornach. b. Filature de Dollfus-Mieg. c. Filature et imprimerie de Blech-Fries à Dornach. d. Manufacture de Nicolas Köchlin à Mulhouse. e. Manufacture de Kohler et Mantz. f. Manufacture de Nägeli. g. Filature de Grossheinz et Hartmann. h. Imprimerie de Heilmann frères. »
Cette planche, au premier plan toujours très bucolique (voir la scène de « déjeuner sur l’herbe » à gauche), est à mettre en regard de la lithographie « Vue de Mulhausen, du côté du couchant » de Jean Mieg. Au point de vue surplombant elle préfère néanmoins un point de vue éloigné qui rend la ville par une ligne horizontale de bâtiments (en premier lieu usiniers) dont se détachent, cette fois, une demi-douzaine de cheminées.

 

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« Cité ouvrière de Mulhouse »
J. Pedraglio (18..-18..), dessinateur, Henri Maurer (18..-18..), dessinateur-lithographe, « Cité ouvrière de Mulhouse ». Mulhouse, vers 1855-1860. Lithographie publiée par Engelmann père & fils. Bibliothèque municipale de Mulhouse, 
En 1853, Jean Dollfus entreprend avec la Somco (Société mulhousienne des cités ouvrières) la construction de la première Cité ouvrière de Mulhouse, sur le modèle des cités-jardins en Angleterre. C’est le premier et unique exemple en Europe de cité ouvrière en accession à la propriété (au bout de 15 ans, les ouvriers qualifiés qui ont versé régulièrement un loyer deviennent propriétaires de leur bien). Le « carré mulhousien », conçu pour abriter quatre familles disposant chacune d’un logement à double orientation, a fait connaître Mulhouse dans les écoles d’architecture. Comme la planche « Projet du nouveau quartier » éditée en 1826, il s’agit davantage ici d’un projet, dont l’ampleur et l’ambition sont particulièrement soulignées par la vue à vol d’oiseau.

 

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Théodore Müller (1819-1879)  « Partie comprenant la chaîne des Vosges de Thann à Sélestadt prise de la campagne de Mr. André Koechlin à Mulhouse »
Théodore Müller (1819-1879), « Partie comprenant la chaîne des Vosges de Thann à Sélestadt prise de la campagne de Mr. André Koechlin à Mulhouse ». Strasbourg, 1844. Lithographie imprimée par Emile Simon Fils, planche XIII du Panorama des Vosges et du chemin de fer de Strasbourg à Bâle (Strasbourg, E. Simon et fils, 1844). Bibliothèque municipale de Mulhouse (fac-similé d’un exemplaire coloré à la main)
Après l’inauguration en 1829 du Canal, en 1839 de la ligne de chemin de fer Mulhouse-Thann, puis en 1841 de la ligne Strasbourg-Saint-Louis, construite par Nicolas Koechlin, Mulhouse se trouve particulièrement bien dotée en matière d’infrastructures de transport (marchandises et passagers). Cette situation sert bien entendu son développement industriel, et au-delà son attractivité.
Cette superbe vue panoramique est prise « de la campagne de Mr. André Koechlin », c’est-à-dire du lieu-dit « Hasenrain » sur lequel il fit construire sa propriété, et édifier cette tour néo-gothique qui offre un point de vue imprenable, au premier chef sur ses établissements (Est-ce lui qui est représenté, au petit balcon de la tour, à la longue vue ?)

 

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Adolphe Maugendre (1809-1895)  « Mulhouse / Mulhausen »
Adolphe Maugendre (1809-1895), « Mulhouse / Mulhausen ». Wissembourg et Paris, entre 1865 et 1869. Lithographie colorée à la main imprimée et éditée par Fr. Wentzel. Bibliothèque municipale de Mulhouse (Achat 2024)
En 1848, « Mülhausen » devient « Mulhouse », et en 1857 la ville est instituée préfecture du Haut-Rhin. Cette estampe imprimée par la célèbre maison Wentzel de Wissembourg dans les années 1860 reprend la planche « Mulhouse, vue prise du jardin de Mr Mansbendel » publiée dans la remarquable suite des Chemins de fer de l'Est - Album des vues les plus remarquables du parcours, dessinées d'après nature et lithographiées par François-Adolphe Maugendre, imprimées en chromolithographie par Auguste Bry, à Paris, en 1857. (C’est pourquoi on y voit encore l’ancien temple Saint-Etienne avec son bulbe, et nulle trace encore d’église catholique Saint-Etienne). 
Le négociant Charles Mansbendel avait acquis un terrain en haut de la rue de Brübach (classée comme telle à partir de 1843), dont l’entrée se situait à l’origine à l’angle de la rue du Frêne. Il y fit aménager un jardin d’agrément et, après 1860, édifier une propriété (sise 44 rue du Jardin zoologique). C’est ce domaine qui offre le premier plan de cette lithographie, qui respire tout particulièrement le second Empire.

 

Mulhouse et son nouveau quartier

 

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Jacques Rothmüller (1804-1862)  « Projet du nouveau quartier de Mulhausen. Vue générale »
Jacques Rothmüller (1804-1862), « Projet du nouveau quartier de Mulhausen. Vue générale ». Mulhouse et Paris, vers 1826. Lithographie éditée par Godefroy Engelmann. Bibliothèque municipale de Mulhouse
Cette large estampe présente le plan du Nouveau Quartier tel que conçu par les jeunes architectes strasbourgeois Jean-Godefroi Stotz et Félix Fries, qui s’inspirent de la rue de Rivoli à Paris et de Percier et Fontaine. Cet ensemble urbain hors de la ville médiévale obéit à un plan triangulaire d'inspiration maçonnique. 
Le Nouveau Quartier est une ode au progrès et la vitrine de la « nouvelle Mulhouse ». Il est construit autour du bâtiment central de la Bourse, qui devait abriter les trois temples de la modernité économique : la Bourse, la Chambre de commerce et la Société industrielle de Mulhouse. L'immeuble fut donné à la Société industrielle par le financier et inspirateur du quartier, Nicolas Koechlin, membre d'une des plus illustres dynasties d'entrepreneurs de Mulhouse, et fondateur de la loge mulhousienne au début du siècle. Le projet immobilier tel que nous le dévoile la lithographie était à l'origine beaucoup plus vaste. Il n'a été que partiellement réalisé ; grosso modo la partie centrale autour de la Bourse, sans l’arc de triomphe représenté.
Au second plan les collines du Rebberg, couvertes de vergers, de vignobles et de bois, sont quasi vierges de toute construction. Le point de vue du dessinateur pourrait être celui du clocher du Temple Saint-Etienne. 

 

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« Vue de Mulhausen prise de la plateforme de la Société industrielle »
« Vue de Mulhausen prise de la plateforme de la Société industrielle ». Strasbourg, vers 1836. Lithographie imprimée à Strasbourg par Simon Fils, servant de planche hors-texte à une brochure de Louis Levrault (1803-1876), Mulhouse et le vieux Mulhausen, tiré à part d’un article paru dans la Revue d’Alsace (t. 1, p. 23-46, 1836). Bibliothèque municipale de Mulhouse.
Le texte de L. Levrault (qui appartient à une branche cadette de la dynastie strasbourgeoise des libraire-imprimeur à l’origine de la maison Berger-Levrault) est un pamphlet sur la Mulhouse industrielle de 1835, ses inégalités et la misère ouvrière, appuyé sur un récit « historique » de Mulhouse très contestable, pointant la bestialité des Mulhousiens avant la réunion à la France…
Les initiales T. M. dans le coin inf. g. pourraient désigner Théodore Müller (1819-1879), qui collabore en 1837 aux belles Vues du Ban de la Roche et des environs, et en 1841 au monumental Panorama des Vosges et du chemin de fer de Strasbourg à Bâle également imprimé par Simon fils. Ce dernier éditera jusque dans les années 1850 d’élégantes estampes consacrées au Nouveau quartier et au Port de Mulhouse, d’après des dessins de J. Pedraglio.

 

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Tournant des 19e et 20e siècles : Urbanisation galopante. La ville à perte de vue

Au 20e siècle, continuités et ruptures

Durant le Reichsland (1871-1918), l’élévation générale du niveau de vie permet l’émergence d’une classe moyenne qui peut s’offrir des loisirs et faire du tourisme. Les représentations de la ville se multiplient alors dans les journaux et dans les guides touristiques : du haut du Rebberg, Mulhouse est présentée comme ville de carte postale, sans fumée, parsemée de parcs, de jardins, de vergers. Le Rebberg lui-même a été profondément transformé : ses chemins creux sont empierrés, il est transformé en parcs et terrasses des villas qui s’y construisent. Il faut aller toujours plus loin pour retrouver les villages, les champs, les bottes de foin ou les gerbes de blé. 
Pendant ce temps…les dynamiques d’urbanisation de la fin du 19e siècle se prolongent jusque dans l’entre-deux-guerres.
Les usines se développent et se transforment sur elles-mêmes. Depuis la seconde moitié du 19e siècle, les usines-blocs, avant de disparaître, sont flanquées de « sheds » qui s’étalent dans les réserves foncières des entreprises. La brique s’impose progressivement dans la construction (« red brick factories »).
Le réseau de tramways et une nouvelle ceinture ferroviaire alimentent le nouveau bassin, mis en service depuis 1874, au nord de la ville, à proximité des casernes. 
Les points hauts se multiplient avec la construction de nombreux lieux de culte au début du siècle : leurs clochers accueillent des photographes qui donnent à voir le réel sans artifice. Les quartiers ouvriers et industriels apparaissent enfin sur les clichés, avec leurs rails, leurs cheminées, leurs immenses ateliers, leurs petites maisons et leurs rangées d’immeubles identiques. 

Marie-Claire Vitoux, Société d’Histoire et de Géographie de Mulhouse

 


 

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Après 1945...

Après 1945 : Reconstruction et urbanisme. La ville « en grand »

La Seconde guerre mondiale ouvre une nouvelle ère. Les bombardements de mai et août 1944 rasent des quartiers entiers. Dans les années 1960-1980, la crise économique entraîne le déclin irrémédiable des entreprises textiles d’abord, métallurgiques ensuite. 
La reconstruction permet le remodelage de l’espace entre gare et rue du Sauvage. Le bâtiment annulaire (1955) est le navire-amiral de la modernité architecturale et urbaine de ces années-là. 
Cette seconde moitié du siècle est surtout le temps des grands ensembles (les Coteaux, mais pas seulement) et de « l’adaptation » de la ville à l’automobile. C’est aussi l’époque où Mulhouse se cherche un nouveau destin européen, avec le quartier de la porte Jeune où, depuis 1974, se dresse la Tour de l’Europe devenue le symbole de la ville … et nouveau lieu propice aux « vues plongeantes ». Les emprises industrielles en déshérence laissent la place à de nouveaux quartiers résidentiels et commerciaux (Daguerre, Faubourg de Colmar), ainsi qu’à des équipements publics (lycées, La Filature).

Marie-Claire Vitoux, Société d’Histoire et de Géographie de Mulhouse

 

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Affiche MrEye
Mr. Eye [Cyrille Meyer]
« Mulhouse. Alsace »
2024. Affiche. Bibliothèque municipale de Mulhouse; achat 2025
Série d’affiches sur Mulhouse inaugurée en 2023.
L’artiste, Cyrille Meyer (Mr. Eye est son anagramme),
est diplômé des Arts Décoratifs de Strasbourg.

À l’aube du XXIe siècle

Depuis les années 1960, la ville n’a cessé de continuer à s’étaler et de coloniser les espaces agricoles proches. La disparition des espaces interstitiels entre Mulhouse et les anciens villages alentours unifie la tâche urbaine en une agglomération sans discontinuité. Sur le ban communal, la phase d’extension urbaine est achevée ; désormais, c’est par renouvellement de la ville sur elle-même que s’opère son développement.  
Résiduelle sur le site DMC et quelques autres lieux, en cours de renouvellement sur le site de l’ex-SACM, l’activité économique dominante en ville est maintenant largement commerciale ou tertiaire, à l’image de la porte Jeune, du campus de l’Illberg ou du parc des Collines., alors que l’industrie est désormais installée à l’écart de la ville (Ile-Napoléon et bords du Rhin notamment).
L’avion permet de prendre l’expression « vues du ciel » au pied de la lettre. Les clichés offrent aux aménageurs une information vraie et une image documentaire sans complaisance de la ville. Les artistes au contraire se saisissent de l’outil de la photographie aérienne pour sublimer la ville.

Marie-Claire Vitoux, Société d’Histoire et de Géographie de Mulhouse


 

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Salle 2 : les récits de voyage évoquant Mulhouse

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Mulhouse, ville-étape

Bien souvent, les voyageurs arrivent à Mulhouse alors qu'ils se rendent en Suisse (trajectoire nord-sud, très fréquente), ou au contraire avant d'atteindre Strasbourg, ville qui est considérée comme un des sommets du voyage (trajectoire sud-nord). Parfois, les touristes souhaitent découvrir les Vosges, et considèrent Mulhouse, ainsi que Colmar, comme un point d'accès aux hauts sommets et aux points de vue.

Cela explique pourquoi, bien souvent, la description de la ville ne lui est pas favorable : on comprend en effet la déception du touriste venu chercher de l'air frais et arrivant dans une cité industrielle, où le peu de temps passé ne lui permettra pas d'en comprendre l'histoire.

Plus rares sont les récits qui font état d'un désir de séjour prolongé à Mulhouse, ou qui mentionnent cette ville comme une destination finale. Certains industriels venus s'installer prennent parfois la peine d'écrire et de publier leurs premières impressions ... qui évoluent souvent avec le temps, une fois que l'âme de la ville a fait oublier son aspect rude et industriel.

Voyage pittoresque en Alsace : par le chemin de fer de Strasbourg a Bâle / par M. Th. de M. de Rouvrois . Risler (Mulhouse), 1844 (p. 226)

 
 
Des Vosges au Rhin. Excursions et causeries alsaciennes / Paul Huot. Berger-Levrault (Paris), 1866 (p. 475) 
 
 
"Mais ce n’est pas par ses monuments de pierre, ce n’est pas par sa rue d’Altkirch dont les élégants et somptueux hôtels peuvent se comparer aux habitations les plus confortables des Champ s-Élysées ou du faubourg Saint-Honoré, à Paris, ce n’est pas même par ses nombreuses filatures […] ni par ses impressions sur étoffe qui en livrent plus de trois cents millions, ce n’est pas par ses fonderies, ses fabriques de machines, de produits chimiques, […] que Mulhouse mérite d’être signalée aux hommes d’intelligence et de cœur chargés d’administrer nos grandes cités manufacturières de l’intérieur; c’est par ses institutions d’instruction, de bienfaisance, et de moralisation que l’on peut citer pour modèles à la France entière."
 
 
Là-bas. Promenade en Alsace en 188... / Braibant, Maurice (1863-1922). Imprimerie Ardéchoise (Privas), 1895 (p. 143)
 
 

"Mulhouse, ville de fabriques, très française. Plus intéressante pour l’ingénieur ou l’industriel que pour le touriste amateur de beaux sites et de riche nature. On peut s’y ennuyer consciencieusement pendant deux ou trois heures. Plus longtemps ce ne serait plus de l’ennui, ce serait la mort, une mort bien triste, au milieu du bruit des machines, dans la fumée des longues cheminées noires, et les odeurs répugnantes des usines."

 
 
A travers l'Italie, l'Autriche, la Suisse et l'Alsace, Dr Matthieu. Fischbacher (Paris), 1901 (p. 414)
 
 
 
Souvenirs de la Haute-Alsace, Thevenin Jacqueline. 1902 (p. 8)
 

"II a quelque chose de lugubre ce nuage qui, constamment plane sur Mulhouse. On s’imagine entrer dans une immense usine et l’on songe aussitôt à ces milliers d’êtres enfermés là-bas, créant la richesse au prix d’un dur travail. "  


 

Une visite royale

A l'automne 1828, le roi Charles X visite l'Alsace. Sur son chemin se dressent les arcs de triomphe, les tribunes, et on lui montre toute la richesse de cette région.

 
De nombreux écrits et de nombreuses planches relatent ce voyage, dont nous avons une idée précise. Que voit-il à Mulhouse ? "Charles X, en venant à Mulhouse, a rendez-vous avec la modernité : il entre, selon sa propre expression, dans « la capitale de l'industrie française ». La « fête industrielle » qu'ont organisée les Mulhousiens se déroule en deux moments principaux ..." (M.-C. Vitoux). Il contemple entre autres une toute nouvelle presse lithographique (démonstration par Godefroy Engelmann) ainsi que l'avancée des travaux du Canal Rhône-Rhin, du haut du bâtiment de la SIM, dominant ainsi le quartier renommé en son honneur "Quartier Charles X".
 
(Voir aussi l'article de Marie-Claire Vitoux, "Une entrée royale au XIXe siècle : Charles X à Mulhouse en 1828". In: Histoire, économie et société, 1998, 17ᵉ année, n°2. pp. 287-298. )

 

Mais aussi...

Pour conclure cette partie, il est intéressant de mentionner l'ouvrage d'Auguste Stoeber (voir le dossier consacré à la famille Stoeber), Curiosités de voyages en Alsace tirées d'auteurs français, allemands, suisses et anglais depuis le 16. jusqu'au 19. siècle (1874), qui recense les récits de voyage en Alsace de voyageurs de marque ! (voir par exemple les extraits "Bâle et Mulhouse en 1579. Extrait des Mémoires de la vie de Jacques-Auguste de Thou", p.  9, et "Montaigne en Alsace et à Bâle, 1580 et 1581", p. 15).

Le récit du séjour de Montaigne à Mulhouse a également été traité par Léonard-Georges Werner en 1933 dans cette brochure, consultable sur le site des Bibliothèques de Mulhouse.


 

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Salle 1A : les Vues de Mulhouse du 15e au 18e siècle

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Mulhouse médiéval : entre imaginaire et restitution

Les rares vues médiévales de Mulhouse sont le fait de chroniqueurs de la fin du XVe siècle et du début du siècle suivant. Les plus fameuses sont incluses dans des chroniques helvétiques retraçant la construction politique de la Confédération (Diebold Schilling l’Ancien et le Jeune). Or, les illustrateurs de ces textes représentaient la ville sans s’y être jamais rendu. Mulhouse était alors parée des caractéristiques communes à toutes les villes de l’Occident médiéval : murs d’enceinte, place centrale, lieux de culte. Leur priorité était de restituer la puissance de l’alliée mulhousienne sous les aspects politiques, civiques, militaires et économiques. Seul le dessin des armoiries permettait d’identifier Mulhouse. Ce parti-pris artistique n’est de loin pas isolé. Les représentations médiévales sont davantage métaphoriques que figuratives. 

 

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place de Mulhouse
Theodor von Liebenau (1840-1914), [Miniature représentant Mulhouse, ornant la Luzerner Schilling (dite Chronique de Lucerne), 1513].
La place centrale est le sujet de l’une des deux vues. On peut y admirer l’activité de la Cité aux temps de la Guerre des Six Deniers (1466-1468). On y voit Hermann Klee, l’un des protagonistes de cet épisode de l’histoire mulhousienne, congédié par les autorités municipales. On peut surtout y lire l’image de la prospérité de la ville. Seules les armes de Mulhouse (la roue) permettent clairement d’identifier les lieux. Autour de la place se dressent de belles demeures, un hôtel de ville (sa première édification date de 1431) et une certaine animation règne dans ce qui constitue une allégorie de la Place de la Réunion actuelle. On y commerce, on y danse au son des troubadours autour de la fontaine, autre signe de richesse. Les bâtiments bordant la place n'ont rien de commun avec ceux qui bordaient la place à la fin du XVe siècle. Ils reprennent néanmoins les codes de l’architecture de la fin du Moyen Âge en Europe du Nord. 
Cette miniature en couleurs représentant Mulhouse présente dans les pages de la Luzerner Schilling a été copiée par l’archiviste et historien lucernois Theodor von Liebenau (1840-1914), d’après la chronique que Diebold Schilling le Jeune (1460-1515) a achevée en 1513 et est conservée au Musée historique de Mulhouse. Malgré quelques différences avec l’original conservé dans les collections de la Zentral und Hochschulbibliothek Luzern, les relevés de l’érudit offrent au regard des saynètes de la vie médiévale. 

Le souvenir de la Cité du Bollwerk au temps du Moyen Âge a engendré une production artistique tardive et singulière. Après la Seconde Guerre Mondiale, l’architecte et artiste mulhousien Alfred Fleck (1887-1974) explore le passé monumental mulhousien en publiant des essais de restitution de l’église médiévale Saint-Etienne peu avant sa destruction mais surtout une reconstitution de Mulhouse vers 1600, en empruntant le tracé des remparts. Certes, le tournant des XVIe et XVIIe siècles s’éloignait du Moyen Âge mais la physionomie de la ville, enserrée dans ses murs, n’avait que peu évolué. Comme les tours du Diable, Nessel et du Bollwerk avaient été largement remaniées à la fin du XIXe siècle, le travail de Fleck, même s’il est subjectif, permet d’en donner une image aussi fidèle que possible à la fin du Moyen-Âge. De son travail de recherche n’a été publiée qu’une partie des planches de l’artiste dont la collection a été déposée à la Bibliothèque municipale.

La ville médiévale a suscité la curiosité et l’intérêt d’artistes et architectes locaux qui ont pu relever et imaginer de possibles reconversions pour des bâtis médiévaux. L’exemple le plus pertinent est le travail mené par Bernard Michau autour du quartier ancien encore subsistant entre la Porte Haute et la Tour Nessel. La vétusté et la dangerosité de cet ensemble qui s’étirait le long des anciennes murailles imposa leur destruction à la fin des années 1970. Les éléments d’une maison adossée aux murs d’enceinte servent de base à la « Maison forte » de l’Ecomusée d’Alsace et le linéaire des fortifications du Jardin des senteurs permet d’approcher au plus près de la réalité du Mulhouse médiéval. Les planches de ces travaux de restitution, menés dans les années 1970, sont conservées aux Archives de Mulhouse.
Le Mulhouse médiéval appartient donc graphiquement à un Moyen Âge imaginé, métaphorique et restitué qui laisse une large part à l’interprétation.


David Bourgeois, 
Société d’Histoire et de Géographie de Mulhouse


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mulhouse en couleur
16e et 17e siècles : Mulhouse en ses remparts

XVIe siècle : de l’abstraction au réalisme

L’avènement de l’imprimerie et le perfectionnement de ses techniques ont permis de diffuser à grande échelle connaissances et images. Le XVIe siècle voit se développer de nombreuses initiatives éditoriales d’historiens, de géographes, de cosmographes dans lesquelles Mulhouse est illustrée en plusieurs occasions. Johannes Stumpf, théologien et historien suisse (1500-1578), l’intègre dans sa chronique et sa topographie des cantons suisses, publiée en 1548 à Zurich. Cette vue fixe l’un des canons de la représentation de Mulhouse à partir du XVIe siècle. On y admire la ville depuis le Rebberg avec, dans le fond, le massif des Vosges des environs de Thann à ceux de Soultz, au relief délibérément exagéré. Les fossés (remplis d’eau comme le montre une version colorisée et dont l’espace entre chacun d’eux est exagéré), les murs et de hautes tours et portes proclament la puissance militaire tandis que s’élancent vers le ciel l’église paroissiale, les églises des anciens couvents – celles des franciscains et des augustins sont les plus facilement repérables -, alors que Mulhouse était passée à la Réforme en 1523. Ce schéma pictural est repris entre 1550 et 1587 puis sous la plume d’historiens mulhousiens qui, en 1890, identifient les principaux lieux en se fondant sur l’œuvre de Stumpf. 

Le point de vue est repris par le géographe allemand Georg Braun (1541-1622) et le cartographe flamand Frans Hogenberg (1535-1590) dans le Civitatis orbis terrarum (Cités du monde) édité à Cologne entre 1572 et 1618. Dans ce recueil, Mulhouse depuis le sud, semble une nouvelle fois adossée aux Vosges. Les principales villes du piedmont (Thann, Cernay, Uffholtz, Wattwiller, Soultz) rythment l’arrière-plan. Comme sur l’illustration de Stumpf, l’importance des forêts alentours est manifeste, davantage dans la plaine (Forêt de la Hardt) que sur les monts vosgiens objets d’une intense exploitation forestière. Autour de la ville au parcellaire resserré, les fossés sont à nouveau représentés très espacés les uns par rapport aux autres, accentuant l’impression de puissance défensive et d’étendue du territoire urbain. Initialement entourées d’un seul canal, les murailles sont à partir du XVe siècle bordées de quatre canaux au sud, trois au nord. Ici sont visibles, de haut en bas : le Traenkbach, le Mittelbach, le Karpfenbach et le Sinnenbach. Les auteurs se sont fondés sur la vue de Stumpf sans s’être confrontés à la réalité du terrain. Néanmoins, cette vue constitue une source précieuse dont s’inspira un artiste anonyme du 19e siècle qui, faussement, date le thème de son œuvre aux alentours de 1550. 
Le 16e siècle ouvre une nouvelle ère dans la restitution picturale de la ville. L’abstraction fait peu à peu place à davantage de réalisme. La représentation de la ville, dans les pages des ouvrages savants, gagne en réalisme tout en mettant en avant la puissance civique et militaire de la cité à travers son système défensif.

David Bourgeois,
pour la Société d’Histoire et de Géographie de Mulhouse

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« Mulhusium »
« Mulhusium ». Gravure sur cuivre publiée dans le Civitatis orbis terrarum (Cologne : 1572-1617) de Georg Braun et Frans Hogenberg. Conservée aux Archives municipales de Mulhouse. Vue générale surmontée de l'aigle impérial tenant deux écussons aux armes de Mulhouse et brochant sur une banderolle avec légende de part et d'autre de l'aigle: « MVLHU = SIVM ».
Cette vue fut publiée dans le Civitates Orbis Terrarum ou encore Théâtre des cités du Monde, que l'on peut considérer comme le premier atlas consacré exclusivement aux plans et aux vues des principales villes du monde. Publié pour la première fois en latin de 1572 à 1617 à Cologne, en six tomes, il regroupe une incroyable collection de gravures sur cuivre, exécutées par Abraham Hogenberg d'après les dessins de Höfnagel. Ce grand atlas des villes contenait 546 perspectives, vues à vol d'oiseau et vues cartographiques de villes du monde entier. Les Civitates étaient destinés à accompagner le célèbre Theatrum Orbis Terrarum (Théâtre du Globe terrestre) d'Abraham Ortelius, édité pour la première fois en 1570 à Anvers, comme l'indiquent la similitude des titres et les références contemporaines communes à ces deux ouvrages complémentaires. La vue de Braun et Hogenberg est à elle-seule un témoin de l’évolution des techniques d’impression des œuvres graphiques au tournant des XVIe et XVIIe siècles. La gravure sur cuivre s’impose, supplantant la gravure sur bois. Les avantages sont nombreux tant pour le matériau d’impression – les plaques de cuivre sont davantage résistantes que celles en bois – que pour la qualité des gravures. Elle reprend la structure de celles de Stumpf et, surtout, de la « Contrafaktur der L. statt Mülhusen » gravées sur bois, mais les avancées techniques sont notoires. Les traits sont plus fins, les motifs plus détaillés, et le travail sur les parties ombrées davantage abouti. Il apparait clairement que l’œuvre de Cologne s’est inspirée de celles de Zürich et de Mulhouse/Francfort. Braun et Hogenberg en reproduisent à l’identique certains détails, par exemple l’arbre s’élevant derrière la Porte Haute sur la « Contrafaktur ». Les Colonais ne se sont en effet pas rendus à Mulhouse avant de publier leur travail ! Ils innovent cependant en rehaussant le phylacyère avec les blasons, dégageant la vue sur les Vosges, et en ajoutant un premier plan (pentes du Rebberg) qui donne l’illusion d’une vue d’après nature et augmente la perspective.
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detail

Gravures du XVIIe siècle

Les vues de Mulhouse au 17e siècle se situent dans la continuité de celles du 16e siècle : elles n’innovent pas dans la facture des dessins qui reprennent l’essentiel du descriptif des vues du siècle précédent ; elles continuent à être prises depuis le Rebberg en direction des Vosges. Du moins l’usage systématique de la gravure sur cuivre leur donne-t-il une plus grande précision de détail, une plus grande lisibilité topographique.
La petite vue de 1625, portant la devise « Ex bello quies » inscrit Mulhouse dans un vaste projet européen philosophico-politique quelque peu fumeux que traduit la présence au-dessus de la roue (pas celle de Mulhouse, c’est une roue de charrette, non de moulin !) entrelacée d’une branche d’olivier, censée recommander la prière à Dieu d’accorder aux peuples « la paix, le repos et l’union » : n’oublions pas que nous sommes au cœur de la féroce guerre de Trente ans qui a épargné la ville. Du moins la gravure se révèle-t-elle particulièrement détaillée. On y lit clairement un système défensif dépassé, hérité du Moyen-Âge ; désormais inadapté à l’usage de l’artillerie, il permet du moins d’éviter les maraudeurs de tous ordres. Les historiens ont aussi relevé le clocher fantaisiste de l’église des Franciscains, l’actuelle église Sainte-Marie.

Le plan Merian de 1642 est bien connu. Il s’inscrit dans le projet monumental des seize volumes de la Topographia Germaniæ du Bâlois Matheus Merian. Fondé sur un plan manuscrit fourni au graveur par la ville en 1641, il est proche du plan lui aussi manuscrit dit « de Berne » conservé actuellement au Musée historique de Mulhouse. La représentation de la ville y est très précise comme le prouvent les annotations chiffrées indiquant les principaux bâtiments. On y lit aussi les 36 rues et les 22 fontaines et puits. Il faut cependant remarquer que les maisons répétitives de certaines rues et les arbres des zones encore non construites au Sud-Ouest de la ville ont été réalisés en série. Ce plan nous est cependant devenu difficile à lire dans la mesure où le Nord n’est pas en haut, comme l’indique la boussole en bas à gauche (« Sep. » pour Septentrion y désigne le Nord). Ce plan Merian a pris très vite une dimension hautement symbolique pour les Mulhousiens : dès 1666, trois bourgmestres de la ville commandent pour la salle du Grand conseil de l’hôtel de ville, haut lieu de la vie politique mulhousienne, un vitrail le reproduisant à l’identique et il continue à être régulièrement reproduit.
Ce plan est accompagné dans sa version de 1644 par une vue de la ville qui ne diffère que fort peu des vues précédentes, sinon par le dessin plus réaliste des Vosges. L’église Saint-Étienne y est aussi mieux dessinée : on y lit clairement le chœur, plus haut que la nef. La présence d’une croix sur le clocher de ce lieu de culte réformé intrigue les historiens. La régularité, digne d’un parc, des arbres bordant les fossés est sans doute un caprice du dessinateur…
La vue de Christophe Riegel de 1690 n’est qu’une modeste copie de la vue de 1625. Elle témoigne, si besoin est, des pratiques de l’édition de l’époque, copiant volontiers les gravures existantes pour les besoins de nouveaux ouvrages.

Bernard Jacqué,
pour la Société d’Histoire et de Géographie de Mulhouse

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 « Ex bello quies. Müllhausen im Elsas » (après 1623)
« Ex bello quies. Müllhausen im Elsas ». Francfort-sur-le-Main, après 1623. Gravure sur cuivre publiée dans le Thesaurus philopoliticus, ou Politisches Schatzkästlein en allemand, de Daniel Meisner et Eberhard Kieser, édité à Francfort-sur-le-Main à partir de 1623. Bibliothèque municipale de Mulhouse, Collection Armand Weiss, dépôt de la Société industrielle de Mulhouse
Le Thesaurus philopoliticus connut un grand succès éditorial dans la première moitié du XVIIe siècle. Le graveur bâlois Matthäus Merian (dit l’Ancien, 1593-1650) y collabora périodiquement, réalisant des dessins et des gravures. Cette participation l’encouragera à publier son ambitieuse Topographia Germaniae. Ce n’est toutefois sans doute pas lui qui a réalisé cette vue de Mulhouse, proche dans sa composition de la gravure sur bois illustrant la Chronick de Johannes Stumpf, plus que de la gravure sur cuivre illustrant le Civitatis orbis terrarum de Braun et Hogenberg. Là encore, la gravure sur cuivre offre une précision accrue et des contrastes intéressants. Les différents plans (dont l’apparition céleste allégorique) semblent se découper les uns sur les autres, la gravure sur bois offrant plutôt, elle, comme un « bloc ».
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Mühlhausen im obern Elsas - 1643
Matthäus Merian (1593-1650). « Mühlhausen im obern Elsas ». Francfort-sur-le-Main, 1643-1644. Gravure sur cuivre publiée dans la Topographia Alsatiæ de Mathäus Merian et Martin Zeiller, publiée à Francfort-sur-le-Main en 1643-1644 (rééditée en 1663). Bibliothèque municipale de Mulhouse, Collection Armand Weiss, dépôt de la Société industrielle de Mulhouse.
Moins connue que la planche communément appelée « plan Merian » de la Topographia Helvetiæe, Rhaetiæ et Vallesiæ, qu’elle suit de deux années à peine, cette vue en perspective de Mulhouse figure dans un autre tome de la Topographia Germaniae, intitulé Topographia Alsatiae (littéralement Topographie de l’Alsace, dont le sous-titre en allemand est: « Das ist Vollkömliche Beschreibung und eygentliche Abbildung der vornehmbsten Städt und Oerther im Obern und Untern Elsaß auch den benachbarten Sundgöw, Brißgöw, Graffschafft Mümpelgart, und andern Gegenden », soit : « Ceci est la description complète et la représentation exacte des villes et lieux les plus respectables de Haute et de Basse-Alsace, et des régions voisines, le Sundgau, le Brisgau, le comté de Montbéliard, et d’autres régions. » Mulhouse a donc le privilège de figurer dans deux tomes différents de la Topographia Germaniae de M. Merian ! 
Proche dans sa composition des gravures de la seconde moitié du 16e et de la première moitié du 17e siècles, dont elle adopte strictement le même point de vue, elle s’en distingue sans doute par sa remarquable exécution, ses modelés et sa lumière.  

 

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« Mülhausen » 1690
Christoph Riegel (1648?-1714), « Mülhausen ». Nürenberg, 1690.
Gravure sur cuivre publiée dans Ausführliche und grundrichtige Beschreibung der herzogthümer Lottringen und Savojen dess Obern und Untern Elsasses, der Franche Comte oder Graffschafft Burgund, und des ganzen Schweizerlandes… (Nürnberg : In Verlegung Christoff Riegels, 1690). Bibliothèque municipale de Mulhouse, Collection Armand Weiss, dépôt de la Société industrielle de Mulhouse
Autre exemple de vue de Mulhouse illustrant un ouvrage topographique du 17e siècle, dû au cartographe, graveur et imprimeur Christoph Riegel (1648?-1714), dont la maison d’édition était devenue l’une des plus importantes de son époque à Nuremberg. L’ouvrage, qui contient comme la Topographia Germaniæ de Matthäus Merian des textes écrits par le géographe et voyageur Martin Zeiller, est toutefois bien moins ambitieux que cette dernière, y compris par son format.

 

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Essais de reconstitution du Vieux Mulhouse vers 1600 de Fleck
Alfred Fleck (1887-1974), [Essais de reconstitution du Vieux Mulhouse vers 1600]. Mulhouse, 1954-1955. Dessins sur papier. Bibliothèque municipale de Mulhouse, fonds Fleck
Les travaux d’Alfred Fleck se fondent sur les représentations du XVIe siècle mais aussi et surtout sur les plans dit de Berne et Merian qui donnent une image aussi précise que possible du parcellaire. Les planches ici exposées permettent d’admirer la ville haute dans sa totalité et la ville basse jusqu’à la rue du Sauvage. La vue y est prise à vol d’oiseau vers le sud. Des imprécisions jalonnent le dessin, notamment une végétalisation sans doute excessive de la ville haute et la dépréciation du rôle des portes Haute et du Miroir qui, ici, ne sont que de simples tours. Néanmoins, la physionomie générale de Mulhouse dans ses murs médiévaux a été restituée.

 


 

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vue 18e s
18e siècle : Une petite cité entre collines et vignobles

Les vues de Mulhouse du XVIIIe siècle renouvellent moins la vision topographique de la ville que l’esprit dans lequel est désormais représenté le paysage urbain. Et alors même que la ville se transforme fondamentalement avec l’essor des manufactures d’indiennes à partir de 1746, rien n’en apparaît dans les représentations de l’époque.
C’est en particulier le cas de la vue de David Herrliberger de 1754-56 : elle s’inscrit dans une Topographie nouvelle et complète de la Confédération, un recueil de 328 planches destiné aux touristes qui visitent la Suisse et en collectionnent les vues comme nous le faisons avec les cartes postales. Résultat, si la ville est toujours vue depuis les premières pentes du Rebberg, celle-ci ne tient plus qu’une place réduite sur la gravure. Quant au Rebberg, il est soigneusement décrit sur le plan végétal : on y voit même pour la première fois dans une gravure quelques pieds de vigne. Il donne lieu aussi à des scènes bucoliques avec un berger gardant ses vaches (il n'y a pas de pâturages au Rebberg…), un élégant couple devisant, un dessinateur, un chasseur, un flâneur admirant le paysage… En clair, nous sommes plutôt dans la Nouvelle Héloïse qu’à Mulhouse ! Cette vision idyllique est d’autant plus étonnante qu’à cette date, des manufactures d’indiennes ont, depuis une dizaine d’années, commencé à transformer la ville, ce qui n’apparaît ici d’aucune manière. Remarquons au passage la principale nouveauté apparaissant dans l’architecture de la ville : le clocher désormais baroque de Saint-Étienne depuis 1707, avec sa galerie pour surveiller les départs d’incendie et son bulbe.
Dans les années qui suivent, les certificats de compagnonnage reprennent cette vue sans ajout majeur, mais avec une plus grande précision dans la représentation des bâtiments. Si les détails bucoliques restent bien présents, ils sont désormais moins nombreux et plus sobres. 

 

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Prospect Der Stadt Muhlhausen / Vue De La Ville De Muhlhouse »  Bâle, vers 1756
David Herrliberger (1697-1777), graveur; Theodor Andreas Genderich (17..-1…), dessinateur ?; « Prospect Der Stadt Muhlhausen / Vue De La Ville De Muhlhouse ». Bâle, vers 1756. Gravure sur cuivre publiée dans David Herrliberger, Neue und Vollstaendige Topographie der Eygnossschaft (littéralement Topographie nouvelle et complète de la Confédération), Ière partie, à Bâle chez Daniel Eckenstein, parue en fascicules à partir de 1754. Fonds Armand Weiss (AW 39)
Vue cavalière depuis le Rebberg imprimée par David Herrliberger, artiste zürichois, graveur et éditeur de plusieurs centaines de vues de villes suisses pour son ouvrage Neue und Vollstaendige Topographie der Eygnossschaft, dans lequel Mulhouse figure à titre de ville helvétique. Entourée de ses remparts, elle se découvre au voyageur au pied de collines bucoliques, tout à la fois lieu de pâture, de culture (vignes), de chasse et de promenade (couple d’élégants promeneurs). C’est du moins la vision idyllique de cette gravure, qui contient une intéressante mise en abîme avec la représentation d’un dessinateur face à la vue (certainement d’après nature) que nous restitue la gravure. Un siècle après la gravure de la Topographia Alsatiæ de Merian, nous avons ici la nouvelle « carte postale » de Mulhouse. 
Une note manuscrite au dos de l’exemplaire des Archives municipales indique qu’en 1760 la Ville de Mulhouse aurait rétribué le peintre Theodor Andreas Genderich pour sa vue (« Prospect ») de Mulhouse figurant dans l’ouvrage de Herrliberger. Genderich était originaire de Bergen, île de Rügen, et s’établit à Mulhouse en 1747. Il restaure en 1779 les peintures de l’Hôtel de Ville. On ignore ce qu’il advient de lui après son départ de Mulhouse fin 1782.
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Prospect Der Stadt Mullhausen Von der Abend Seite / Vue De La Ville De Mulhouse Du Côté du Couchant 1770
David Herrliberger (1697-1777), « Prospect Der Stadt Mullhausen Von der Abend Seite / Vue De La Ville De Mulhouse Du Côté du Couchant ». Zürich, 1770. Gravure sur cuivre publiée dans David Herrliberger, Nouvelle Topographie Helvétique (tome III) / Neue Topographie der Eidgnosschaft (Dritter Haubttheil), Zürich, 1770. Fonds Armand Weiss (AW11)
Nouvelle vue du même artiste suisse, prise cette fois en surplomb des prés de l’Ill, avec légendes en allemand et en français renvoyant aux édifices numérotés dans la gravure. Ces légendes sont du reste fautives : venant du sud-est, ce sont la porte de Bâle, les tours du bastion et la Porte Jeune qui se profilent, non les Portes Haute, Nessel et du Diable. De même, la chapelle de l’ordre des chevaliers teutoniques est confondue avec celle des Franciscains. L’auteur s’étant peut-être inspiré du plan Merian, en ne tenant pas compte de l’orientation de ce dernier (en direction du levant, et non du couchant). Comme dans la gravure précédente de 1756, le premier plan est bucolique, avec son promeneur au repos en bordure du chemin… L’ouvrage comprend également une vue d’Illzach.
(A noter que « Du Côté du Couchant » signifie ici « en direction du couchant », donc de l’ouest, alors que les estampes des années 1810-1820 indiqueront pour la même orientation « du levant », au sens de « depuis le levant », « en direction du couchant »).
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Certificat
« Der Stadt Muhlhausen / Vue De La Ville De Muhlhouse ». Bâle ?, après 1780. Gravure sur cuivre imprimée avec un certificat de compagnonnage (ici vierge). Bibliothèque municipale de Mulhouse
Gravure non signée, inspirée de celle publiée par David Herrliberger en 1756 dans sa Neue und Vollstaendige Topographie der Eidgnosschaft, dont elle reprend le titre. Il existe des tirages séparés de cette vue de Mulhouse, figurant dans un encadrement rectangulaire de style classique, avec cartouche ovale orné aux armes de Mulhouse. Ici l’encadrement du certificat prolonge celui de la vue, qui s’inscrit tout à fait dans la continuité des deux gravures publiées par Herrliberger et de leur dimension bucolique. Mulhouse y apparaît ceci dit bien petite, ramassée en ses remparts et comme figée dans le temps, alors même que depuis le milieu du siècle des manufactures ont commencé à transformer la ville. Ce n’est vraisemblablement pas une vue « d’après nature ».
Une note manuscrite au dos d’un exemplaire des Archives municipales indique qu’en 1788 la Ville de Mulhouse acquiert auprès de Christian von Mechel (1737-1817), graveur et éditeur originaire de Bâle, où il est alors installé, la plaque de cuivre, un tirage spécial de 100 épreuves de la gravure, ainsi qu’un jeu de feuilles de papier (grandes et petites), vraisemblablement pour la réalisation des certificats de compagnonnage, en usage jusqu’à la fin du XVIIIe siècle. Au moins un exemplaire connu du certificat de compagnonnage, datant de 1780, reprend quant à lui la gravure de 1756 de Herrliberger, avec un encadrement de style baroque. Il pourrait donc s’agir ici de la nouvelle maquette du certificat, d’où la commande passée par la Ville à l’atelier de Mechel à Bâle.

 

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Source Cobalt 60

Archives de l'Institut Charles Sadron

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L’institut, tout d’abord nommé Centre de recherche sur les macromolécules, a été fondé par Charles Sadron vers 1947. Il s’agit de la première unité propre CNRS créée en province. Le laboratoire s’appuie sur le concept d’usine à recherche, inspiré par l’expérience de Charles Sadron à Pasadena, qui permet le développement de moyens et la fluidité des échanges entre chercheurs. Il accueille des chercheurs de plusieurs disciplines : physiciens, chimistes et biologistes autour de la recherche sur les macromolécules et les polymères, en étant ouvert à l’international et aux collaborations avec le monde de l’industrie.